jeudi 21 juillet 2011

Autisme : Définition.

Autisme : 

DEFINITION DE L'AUTISME

origine et définition :
Le terme «autisme» vient du grec "auto" qui signifie «soi-même». Il est employé en psychiatrie pour la première fois en 1911 par le psychiatre suisse Eugene BLEULER. Il l'utilise pour désigner dans la schizophrénie adulte la perte du contact avec la réalité extérieure qui rend difficile ou impossible pour le patient toute communication avec l'Autre. Plus tard, d'autres auteurs le décriront comme un symptôme particulier, non spécifique de la schizophrénie, et en feront ainsi une pathologie à part entière.

L'autisme de KANNER

En 1943, dans un article intitulé "Autistic Disturbance of Affective Contact", le psychiatre américain L. Kanner décrit sous le terme "d'autisme infantile précoce" un tableau clinique caractérisé par l'incapacité pour le bébé, dès sa naissance, d'établir des contacts affectifs avec son entourage. KANNER caractérise la spécificité de ce symptôme, et en fait un syndrome clinique à part entière, avec un mode d'apparition et une évolution radicalement distincts de la schizophrénie. «Ce n'est pas comme dans la schizophrénie adulte ou infantile, un commencement à partir d'une relation initiale présente, ce n'est pas un retrait de la participation à l'existence d'autrefois. Il y a, depuis le départ, une extrême solitude de l'autiste qui, toutes les fois que cela lui est possible, dédaigne, ignore, exclut tout ce qui vient de l'extérieur.».
KANNER note dans son article plusieurs signes cliniques particuliers à cette forme de psychose qu'est l'autisme: 

1.Un début précoce des troubles avant la fin des deux premières années de la vie.
2.Un isolement extrême: l'attitude de l'enfant est marquée par une profonde indifférence et un désintérêt total vis-à-vis des personnes et des objets extérieurs.
3.Une grande immuabilité.
4.Des stéréotypies gestuelles, certains gestes apparaissant étranges et répétitifs, comme agiter un mouchoir continuellement devant les yeux, remuer les doigts devant le visage, déambuler sur la pointe des pieds, tournoyer sur soi-même, se balancer d'avant en arrière pendant des heures...
5.Des troubles du langage : l'Enfant est soit totalement mutique, soit il émet des sons sans signification, soit il répète les mots sans valeur communicative (l'écholalie est une répétition en écho des mots ou des phrases des autres). Il note aussi l'incapacité d'utiliser les noms propres, l'utilisation des néologismes. 

KANNER décrit enfin l'intelligence et la mémoire exceptionnelles de ces enfants, et ces derniers traits caractéristiques distinguent l'autisme de toutes les autres formes d'arriération connues en psychiatrie.
Elaboration de l'appareil psychique : 

Comment entrer en contact avec l'univers interne de l'enfant autistique ?
De quoi est fait son espace psychique ?
Quels types d'angoisse affronte t'il ?

L'angoisse première :

C'est une notion qui a à voir avec le vide, l'écoulement, l'évaporation, l'explosion. La substance psychique doit avoir un contenant pour ne pas s'évaporer, pour ne pas se vider. Ce contenant, qui permettra à l'enfant de vivre entier, c'est la Mère et l'environnement maternel.

De 0 à 2 mois : Position autistique. L'enfant est centré sur lui-même et ses sensations.
De 2 à 8 mois : Position symbiotique. Il y a confusion entre le Moi et l'Autre.
Après 8 mois : Position dépressive. "Je suis Moi et il y a l'Autre".

Le contenant :

C'est dés la position autistique qu'une place primordiale doit être donnée au contenant. Les expériences perceptives du bébé ne sont pas liées entre elles. Il vit des moments où il se sent contenu, et d'autres moments où il se sent tomber. Tout cela ne se distingue pas des autres sensations (tactiles, de chaleur, d'être porté ou non, de bouger, de contact...). Toutes les sensations sont mélangées et mauvaises. Il s'en débarrasse en tapant des pieds et en criant. Notons que ces phénomènes se retrouvent chez les adultes, de manière beaucoup moins intense.

Les protections :

L'enfant est très tôt confronté à la peur de mourir. Il s'accroche à la vie au moyen de mécanismes de défense psychiques:

1) Démantèlement. C'est un mécanisme passif qui consiste à faire en sorte que le Moi précoce soit suspendu, cesse d'exister. Les manifestations pulsionnelles sont désintégrées et l'enfant ne ressent plus l'angoisse. Cela devient pathologique quand le mécanisme est utilisé de manière excessive, massive, stéréotypée. Le démantèlement semble être la base de tout ce qui a à voir avec le fait de suspendre tout lien avec l'extérieur (par exemple dans la toxicomanie). Cela s'observe chez l'autiste quand il coupe tout contact par son regard dans le vague, ailleurs.

2) Identification adhésive. Forme d'identification en surface. Cela s'observe dans l'écholalie où juste la surface de l'attitude et du comportement est réutilisée. C'est vidé de sens. C'est en fait tout ce qui est de l'ordre du mimétisme, de l'accrochage à une sensation pour éviter l'angoisse de la chute (on notera par exemple le regard qui se fixe sur un point...). Cela concerne le contact corporel et psychique. Le mécanisme d'identification adhésive a pour but d'éviter de disparaître. 

Pôle institutionnel ... dans le quotidien, la vie de tous les jours. 

Dans l'arrivée de l'enfant à l'hôpital de jour, il y a prise en compte de la part des parents du problème psychiatrique. Les prises en charge se font souvent en petits groupes. Ce sont pour la majorité des enfants qui ne parlent pas. La mise en sens de ce qui se passe est fonction du ressenti du soignant. Il convient de repérer l'intensité d'angoisse qui est vécue par chacun de ces enfants. Il faudra les amener à renoncer à leurs défenses archaïques, et pour cela leur fournir un contenant extérieur.

Notons que les enfants autistes, de même que les bébés ont un psychisme confronté à l'angoisse.
Il sera important d'être avec l'enfant dans un lieu fermé, pour qu'il puisse se poser quelque part, et de vivre le moment présent. L'enfant a besoin d'être tenu, contenu. Pour certains d'entre eux, quand le lien est coupé, c'est l'effondrement. La régularité des retrouvailles crée une histoire qui aide l'enfant.

Origine

Il n'y a pas une cause à l'autisme, mais plutôt un "télescopage" entre des facteurs provenant de deux sources:

En ce qui concerne la Mère, on peut noter une dépression post-partum non contenue et non perçue par l'entourage. Cela provoque un non investissement psychique du bébé.
En ce qui concerne l'enfant, on pourra retenir des éléments organiques, ou une sensibilité excessive. L'enfant se sent plus tôt qu'un autre détaché de sa Mère, et se trouve confronté dans ce cas, à une Mère défaillante qui ne peut compter sur lui pour se restructurer. 
Une des fonctions du bébé est de restructurer sa Mère. La femme déprimée qui trouve un bébé souriant en rentrant chez elle (un bébé qui répond et sollicite sa Mère), pourra compter sur la relation induite par l'Enfant pour restructurer le Moi défaillant, pour se réparer. Le bébé gratifie, satisfait narcissiquement la Mère déprimée. On peut donc parler d'évènements circonstanciels d'où résulte l'autisme.
Notons que l'autisme touche en majorité les garçons (à 80%).

Il sera bon de travailler en collaboration avec un psychomotricien qui aura 3 préoccupations :

1.Au niveau du corps adroit, il s'attachera aux mouvements issus de la gymnastique où il est essentiel de rééduquer la fonction motrice. Le corps devra devenir le moins maladroit possible.

2.Au niveau du corps conscient, il s'attachera à l'aspect émotionnel. Il faut imprimer le corps de sensations, au moyen par exemple du yoga, de la relaxation etc...

3.Au niveau du corps fantasmatique, du corps signifiant qui dit quelque chose à notre insu. C'est à ce niveau que s'exerce l'influence, dans le travail du psychomotricien, de la psychanalyse. 

Il faut noter que plus la pathologie est lourde, plus la différenciation des interventions est aléatoire. L'éducatif rejoint alors le thérapeutique, dans une vision plus globale où l'acte lui-même n'est pas très important, alors que ce qui est ressenti, représenté psychiquement l'est davantage.

Le psychomotricien devra être sensible à ce que veut montrer l'enfant.

Fonction de contenance

L'enfant a besoin de trouver un contenant où déposer ses angoisses insupportables. Quand il ressent une émotion insoutenable, il l'extériorise par des cris, des décharges motrices, et fait revivre cette émotion à la Mère. Celle-ci interprète, donne un sens et va faire en sorte que cette émotion devienne supportable pour (et par) l'Enfant: L'intolérance à la frustration va diminuer. Cela nécessite que la Mère soit présente, disponible psychiquement et physiquement. C'est à dire que rien ne l'occupe par ailleurs. Il faut qu'elle ne soit pas détruite par cette émotion, qu'elle puisse la surmonter et donc tolérer la réaction de l'Enfant. La Mère récupère l'Objet psychique évacué et le restituera au bébé une fois que ce sera rendu plus tolérable.

Dans un deuxième temps l'Enfant devra intérioriser cette fonction qui lui permettra de ne pas subir l'assaut d'une émotion trop violente. Il aura alors en lui une "fonction maternelle". L'Enfant fera d'abord appel à sa Mère interne (hallucination) et ensuite il fera appel à la Mère externe (le vraie), mais le travail psychique sera déjà en partie accompli.

A la fin de la première année, la Mère interne sera permanente, et remplacera la vraie Mère lorsque celle-ci sera absente.

Chez l'autiste (Etre humain qui s'est construit un système de relation à l'Autre de type autistique), il n'y a pas ce mécanisme. La séparation n'est même pas ressentie. C'est le vide permanent. Dans une forme plus développée (autisme secondaire), la Mère interne est présente mais pas assez forte. Dans la psychose symbiotique, la séparation est vécue comme une atteinte intolérable à la toute puissance.

Quelques caractéristiques

- Il y a une grande difficulté à maintenir ces enfants dans un réseau familial et social, ainsi qu'un grand risque de les enfermer, de les exclure dans des institutions spécialisées.

- Difficulté aussi pour ces enfants d'être vécus comme sujets, les stigmates faisant écran à une souffrance qui est bien au delà du corps.

- Les autistes sont tous confrontés à la mort, et le discours les concernant tourne bien souvent autour (mort physique et mort psychique).

- Le soin psychiatrique doit lutter contre l'enfermement, le totalitarisme. Il faut un cadre suffisamment solide et protecteur, mais remaniable et vivant.

- Les soins physiques sont nécessaires mais ne doivent pas réduire le sujet à la seule science médicale objective. Il faut travailler aussi sur la fantasmatisation, la désillusion chez les soignants, leur dépression... L'approche de ce type d'enfant doit être la même que pour tout être vivant, et se faire aussi sur un mode symbolique.
Source :

http://psychiatriinfirmiere.free.fr/

Autisme : Frances Tustin.

Autisme :

Frances TUSTIN (1913-1994)

Son oeuvre est centrée sur l'autisme. Pour Tustin, l’enfant autiste a un fantasme de rupture catastrophique de continuité, principalement discontinuité bouche-langue-mamelon-sein. Elle a traité de nombreux enfants autistiques. Son œuvre écrite, considérable, se situe dans la lignée des recherches de Mélanie KLEIN .

La psychanalyste Frances TUSTIN est d'origine Britannique. Son enfance est marquée par la séparation de ses parents et une instabilité importante. Fille unique, elle vit avec sa mère quantité de déménagements. C'est pendant sa formation d'enseignante qu'elle est sensibilisée à la psychanalyse . Elle entreprend alors une formation à la psychothérapie des enfants. Parallèlement, elle se fait analyser par BION. Elle se consacre à l'étude et au traitement de l'autisme infantile qui vient d'être identifié par Leo Kanner.Son oeuvre est centrée sur l'autisme. Pour Tustin, l’enfant autiste a un fantasme de rupture catastrophique de continuité, principalement discontinuité bouche-langue-mamelon-sein. Elle a traité de nombreux enfants autistiques. Son œuvre écrite, considérable, se situe dans la lignée des recherches de Mélanie KLEIN .
L'autisme est un état centré sur le corps, dominé par la sensation qui constitue le noyau du soi. Le soi est la sensation et rien d'autre. Les objets du monde extérieur sont perçus comme venant de ce corps dominé par la sensation, et non comme ayant une existence propre. Il y a absence de différenciation, dans un état autistique normal. Mais certains sujets restent enfermés dans cet autisme normal à la suite de détresse, d'impossibilité d'en sortir ou de dysfonctionnement existentiel. La naissance psychologique, c'est le point d'aboutissement du processus de développement, et la catastrophe psychologique arrive quand ce point n'aboutit pas. Il n'y a alors pas de naissance, il n'y a pas de frontière entre le soi et le non-soi. Cet état est dominé par des Objets autistiques: ce seront des parties du corps de l'Enfant, de la Mère, du monde extérieur, tout cela étant vécu comme appartenant au corps de l'Enfant. Ces Objets ne sont jamais Objets transitionnels .

Notons bien que lors du développement habituel, l'Objet est d'abord autistique, et devient progressivement transitionnel. Alors que dans l'autisme, le vécu du corps n'est pas éclaté du tout, mais très dense au contraire.

Solipsisme : il n'y a pas d'autre réalité que lui-même.

Classification de l'autisme en trois groupes

1.autisme primaire anormal : il s'agit d'une prolongation de la période habituellement transitoire de l'autisme. Cette forme est appelée "amibienne" et est caractérisée chez le bébé par le fait qu'il n'y a pas de différenciation entre son corps, celui de sa mère et l'extérieur. La surface corporelle est sans limite. Les sensations sont primitives, et le fonctionnement mental est principalement axé sur elles. L'origine de cette forme amibienne est due à une carence au niveau des premiers nourrissages.
2.autisme secondaire à carapace : sensiblement identique à l'autisme de KANNER. L'indifférenciation entre le Moi du bébé et la Mère a disparu, remplacée par une surévaluation de la différence. Une barrière autistique à fonction de carapace s'est construite pour protéger l'Enfant, et lui interdire l'accès au monde extérieur. Son corps est devenu raide, insensible, la pensée est inhibée, l'activité fantasmatique excessivement pauvre.
3.autisme secondaire régressif : ou schizophrénie infantile. L'évolution commence de façon normale, puis apparaissent des manifestations de régression. L'Enfant opère son retrait dans une vie fantasmatique riche et centrée sur les sensations corporelles.

Autisme : La méthode des "3i"

Autisme :

La méthode des "3i"
D’où vient-elle ? 
- de l’expérience réussie avec un enfant il y a 5 ans 
- des principes de plusieurs méthodes américaines basées sur le jeu
- de l'expérience obtenue par le suivi de près de 100 enfants avec succès aujourd'hui 
- de rencontres avec des chercheurs 
- de toutes les observations faites dans le tableau « Ce qu’il faut savoir sur l’autisme ».
Cliquez ici pour visualiser la vidéo : Méthode des 3i et les autres méthodes
 Ses Caractéristiques :
Stimulation individuelle : 
- Seul avec un adulte
- Dans une petite pièce aménagée, qui lui permettra de se concentrer en évitant les bruits,
la lumière, équipée d’une table, de 2 chaises, de quelques jeux installés en hauteur.
Stimulation intensive :
- 40 heures par semaine (incluant week-end et vacances), 6 heures par jour, ce qui implique 
une trêve scolaire.
- Le succès de l’éveil de l’enfant est la résultante du « stock d’heures investies » 
On ne peut pas tricher avec le temps ni le raccourcir, le temps de ce travail dépendra 
de chaque enfant.
Stimulation interactive : 
La communication est l’objectif prioritaire à travers toutes les activités 
et non l’apprentissage de connaissances et de savoir-faire.

Par ex : si on fait de la pâte à modeler, l’important n’est pas de savoir la rouler et l’aplatir, 
mais de capter le regard de l’enfant de façon permanente ou d’amorcer un dialogue et 
un échange gestuel et verbal. Les connaissances et les savoir-faire suivront naturellement. 
Ni atelier ni leçon au départ.
  Ses Supports :
LE JEU
Le jeu a une place centrale pour le développement et l’éveil de tout enfant.
Le jeu lui permet de créer la détente qui va engendrer l’éveil progressif nécessaire pour passer
par tous les stades du jeune enfant qu’il a occultés : regard, pointage, marionnettes, quatre pattes et langage... donc de pouvoir entrer en relation avec les autres visuellement, gestuellement, verbalement, comme le font tous les enfants entre 0 et 2 ans, par étape.
Donc il faut tout transformer en jeu et s’amuser sans aucune attente comme avec un tout petit,
en partant toujours de ses centres d’intérêts.
Rentrer dans son monde tout doucement par l’affection, la tendresse et le respect pour l’amener peu à peu au nôtre. 
Un programme évolutif est défini chaque mois après une évaluation globale de l'enfant de 0 à 5.
Dès le niveau 4 atteint et dès que l’enfant parle, imite, regarde bien, il commence par étapes à réintégrer l’école.
  Ses Exigences :
Implication des parents dans le suivi individuel de l’enfant et pour la coordination de l’équipe des intervenants.Acceptation de la méthode par tous les intervenants(même des professionnels : orthophoniste, psychomotricien, psychologue…) : application dans son intégralité.
Le mélange avec d’autres méthodes, amène une progression de l’éveil de l’enfant moins rapide et des régressions.
Travail d’équipe : parents, volontaires, orthophoniste, psychomotricien, psychologue, professeurs et directeur de l’école, responsables de l’Association A.E.V.E.
Les objectifs mensuels sont pris en équipe, avec le conseil permanent de l’association.
Ceci suppose des réunions bilans régulières : tous les mois à jour fixe avec toute l’équipe. 
Le rapport est fait par la psychologue et donné à chaque intervenant.
 Ses Objectifs :
- Prendre le temps de le faire repasser à son rythme par tous les stades du développement 
sans apprentissage et par le jeu interactif. Ce qui l’amènera à :
- être un enfant comme un autre, capable de communication, de rentrer en relation et de se sociabiliser.
être autonome non par l’acquisition de réflexes mais de comportements spontanés ou personnels... grâce à sa possibilité d’imiter les autres.
- L’intégrer à l’école par étape, d’abord par l’école à la maison (remise au niveau scolaire de son âge) puis l’école (quelques heures puis mi temps...).
Donc, en jouant dans sa salle de jeu, il quittera un peu l’école pour sortir de sa bulle et pour mieux y revenir au niveau des enfants de son âge, jouant et travaillant comme les autres :
QUITTER L’ECOLE POUR MIEUX Y REVENIR.

Autisme : communication par le jeu. Par Marc Valloton.

Autisme

La communication par le jeu

Valentin, 9 ans, est atteint de troubles autistiques. Sa maman, la Touraine Nadia Mivelaz, a suivi une formation pour une thérapie nouvelle en Suisse, basée sur le jeu. Elle cherche des bénévoles pour la seconder.

Pour aider son fils Valentin à s’ouvrir aux autres, Nadia Mivelaz compte sur une approche nouvelle, basée sur le jeu 
(C. Haymoz)
Comme tous les enfants de son âge, Valentin adore jouer. A neuf ans, il y passe même des heures, chaque soir, avec sa maman, Nadia Mivelaz. Mais pour lui, qui souffre de troubles autistiques, le jeu prend une autre dimension: il constitue la base d’une méthode qui doit l’aider à entrer dans notre monde.
Baptisée Son-Rise, cette approche, développée aux Etats-Unis dans les années 1970, est encore nouvelle en Suisse. Nadia Mivelaz l’a découverte par un article de L’Illustré, où une dame expliquait que le jeu avait sauvé son fils de l’autisme. «Cet article m’a fait rêver», affirme-t-elle.
En juin dernier, elle suit le premier cours d’initiation organisé en Suisse. Outre l’apprentissage de la méthode, cette formation lui a permis de considérer les événements sous un autre angle. «J’y ai appris à voir le côté positif des choses, de réaliser tout ce que cet enfant m’a apporté.»
Faire confiancePour Valentin, qui parle et commence à lire et écrire, le jeu est un moyen d’apprentissage de la communication. Dans la maison familiale, à La Tour-de-Trême, une chambre spéciale a été aménagée pour jouer avec lui. «Dans cette pièce, explique Nadia Mivelaz, il n’y a pas de stimuli extérieurs, parce que les sens d’un enfant autiste sont développés différemment. Le moindre détail peut le perturber.»
Peu de bruit, des fenêtres translucides, tout est prévu pour que Valentin se sente à l’aise. C’est aussi une salle où l’on ne dit pas non: la méthode se fonde sur une attitude de non-jugement. Le but est de faire confiance à l’enfant, de l’encourager et de le féliciter chaleureusement dès qu’il effectue quelque chose de positif.
Aller dans son mondeLes jeux sont placés sur des étagères, en hauteur, «pour qu’il soit obligé de les demander et donc de communiquer». Dans cette salle, «c’est lui qui contrôle tout, il nous utilise pour jouer. Il y a toujours une interaction.» Nadia Mivelaz résume ainsi un des principes de base de Son-Rise: «Aller dans le monde de l’enfant pour l’aider et le motiver à rejoindre le nôtre.»
Parce que Valentin a envie d’apprendre. «Il a toutes ses capacités cognitives et il nous le démontre chaque jour. Mais il ne peut pas exprimer tout ce qu’il sait.» Il y a environ une année, par exemple, Valentin a appris à lire. Désormais, il lit beaucoup par lui-même, comme s’il avait compris à quel point cela pouvait lui être utile.
«Aujourd’hui, il veut même faire les fiches de devoir de sa sœur», sourit sa maman, en ajoutant: «Il nous épate chaque jour.» Depuis l’âge de quatre ans, Valentin fréquente le centre scolaire et éducatif de Clos-Fleuri. «Il fait de réels progrès. Son-Rise ne va pas remplacer le travail des professionnels, mais c’est un complément.»
Bénévoles souhaitésMère de deux autres enfants de 13 et 7 ans, Nadia Mivelaz cherche aujourd’hui des bénévoles pour l’aider dans son défi. Idéalement, elle en espère une dizaine. «Aucune expérience particulière n’est nécessaire», précise-t-elle.
Peu importe l’âge ou la formation, l’important est l’énergie et l’enthousiasme de ces personnes qui accepteront de consacrer deux à quatre heures par semaine, pour au moins un semestre. «Ces personnes peuvent aider énormément Valentin, mais lui aussi peut leur apporter beaucoup.»
Contact: Nadia Mivelaz, La Tour-de-Trême, 026 912 15 05 ou fam.mivelaz@vianw.ch
La difficulté du diagnosticComme beaucoup de parents d’enfants autistes, Nadia Mivelaz et son mari ont rencontré des difficultés pour connaître le problème de leur fils. «Quand Valentin avait environ deux ans, ma belle-sœur m’a fait remarquer qu’il ne répondait pas quand on l’appelait», raconte Nadia Mivelaz. A l’époque, son mari travaillait à Vevey et ne rentrait que le soir. «Un autre enfant lui aurait sauté au cou. Valentin ne réagissait pas. Mais avec moi, il a toujours été très câlin.»
Son pédiatre affirme que le manque de réaction de Valentin est dû à la paresse. Ses parents insistent, lui font passer des examens approfondis au CHUV. «Un professeur nous a dit que le nerf auditif était touché, mais que ce n’était en tout cas pas de l’autisme.» C’est finalement le pédopsychiatre Patrick Hämmerle, à Fribourg, qui a posé le bon diagnostic.
Un enfant sur 2000Décrit depuis 1943, l’autisme est un trouble du développement neuropsychologique qui touche environ un enfant sur 2000, dans une proportion de quatre garçons pour une fille. Les personnes autistes peuvent être atteintes à divers degrés et présenter d’autres handicaps. L’origine de l’autisme se trouve dans un développement anormal du cerveau. Des critères génétiques entrent aussi en ligne de compte. Selon Nadia Mivelaz, beaucoup de parents se sentent encore coupables, alors qu’il est aujourd’hui certain que ce trouble ne résulte en rien de leur attitude.
Les enfants autistes présentent des difficultés dans la communication verbale et non verbale (ils répètent les mots ou parlent sans arrêt du même sujet), dans la relation sociale (indifférence par rapport aux autres), dans le développement du jeu et de l’imagination. Ils résistent également aux changements de leurs habitudes.
Dans le canton, il existe un Groupement fribourgeois de pa-rents et amis de personnes atteintes d’autisme (GFPAPA). Au niveau romand, une association Autisme Suisse Romande (www.autisme-suisse.ch) peut également fournir renseignements et conseils (021 341 93 21).

Au Nom-Du-Père... Par Jean-Marie Demarque, théologien, psychanalyste.

Au Nom-Du-Père...

Par Jean-Marie Demarque,
Théologien, psychanalyste.


Un terme banal s'il en est pour qui n'y prête qu'une attention distraite mais qui peut soudain, à quiconque s'y arrête pour en sonder les profondeurs révéler des aspects cachés de son histoire, les illuminer d'une clarté insoupçonnée, leur donner sens .
Elisabeth Roudinesco et Michel Plon, dans leur « Dictionnaire de la Psychanalyse[1] »en donnent, en tête de l'article s'y rapportant, la définition suivante : « Terme inventé par Jacques Lacan en 1953, et conceptualisé en 1956 pour désigner le signifiant de la fonction paternelle. »
Tiens, c'est amusant : moi j'ai été « concrétisé » en 1956 !
Mais laissons-là la plaisanterie, essayons d'y voir plus clair et interrogeons-nous sur le sens du mot « signifiant ».
Emprunté au structuralisme de Ferdinand de Saussure, cette expression devient chez Lacan ce quelque chose qui, sans que le sujet le sache va déterminer sa pensée, ses mots, ses gestes et peser in fine parfois lourdement sur son destin. Nous pourrions donc voir dans le « Nom-du-Père »l'impact laissé dans notre existence au sens fort du terme par tout ce qui a bâti, de manière consciente ou inconsciente notre personnalité, comme un reflet de la transmission du nom « de famille » dans notre lignée agnatique. Du nom, bien sûr, mais aussi des traditions, des « habitudes » sans doute, et, au-delà de tout cela, bien d'autres choses infiniment plus complexes et parfois, sinon toujours, pesantes ! Transmission parfois même des frustrations : 
« Ils seront pharmaciens, parce que papa ne l'était pas ![2] »

Ce que fut mon père, par-delà la vie et le nom qu'il m'a donnés, par-delà même l'éducation que j'ai pu recevoir de lui a façonné mon être à l'image de ce qu'il fut ou, a contrario, comme une sorte de négatif de ce qu'il a pu être ou signifier pour moi. Une constatation générale qui s'applique dans la plupart des cas à chacun de nous : nous sommes tous fils ou fille de quelqu'un, dont généralement nous portons le nom, et que nous imitons ou rejetons, consciemment ou non... La part de l'inconscient étant ici, je crois, vraiment celle du lion !

J'ai le sentiment très net, et de plus en plus au fur et à mesure de ma propre analyse, que l'entièreté de ma vie dans ses moindres détails prend sens pour moi dans ce « Nom-du-Père », là même et peut-être surtout où j'ai été en réaction, tentant d'être moi-même, d'être « autre[3] » sans pouvoir échapper au « moule » dont j'étais issu. Conçu, procréé que j'étais à l'image et à la ressemblance de mon père[4]. Et lorsque parfois j'ai voulu me dissocier de ce label que je n'avais pas plus demandé que de naître, je n'ai réussi, avec souvent beaucoup de douleur, qu'à me constituer comme étant son négatif, au sens photographique du terme !

Une chose, une seule a joué, de manière drastique et a pu rompre les chaînes qui me tenaient captif,  une chose pénible, difficile, douloureuse: le drame d'un double deuil brutal qui me privant de mes racines comme de mes branches me laissait face à moi-même et à la vie comme un simple tronc susceptible seulement de consomption ou de façonnage. Fort heureusement, après quelques tâtonnements, c'est pour ce dernier que j'ai opté !

Façonnage que j'appellerais d'ailleurs plus justement « reconception », puisque je perçois, jusqu'au plus intime de mes fibres profondes ma vie d'aujourd'hui comme une renaissance, au sens le plus plénier. Une expérience que je connais bien, de par mon passé chrétien où j'ai pu parfois la percevoir dans un cadre essentiellement spirituel, celui de la « nouvelle naissance » du converti, du « mécréant » qui vient à la foi et à qui il est signifié que son passé est effacé, qu'il est « né de nouveau » ! J’ajouterais qu’ici, c’est encore différent dans le sens ou je crois qu’il serait plus adéquat de parler de naissance que de renaissance, le dernier terme impliquant une répétition, le premier renvoyant à un acte initial, nouveau, totalement fondateur.

Mais ici c'est différent, et bien plus fort : a de nombreux égards, je n'ai plus rien de l'homme que j'ai tenté d’être auparavant, tout en restant, fondamentalement qui j'ai toujours été, ou plutôt, en en prenant conscience. J'ai la nette conviction de n'avoir pas vraiment, « véritablement » vécu ma vie passée, qu'elle ne fut qu'un long et laborieux accouchement de qui je suis depuis toujours mais dont la personnalité véritable n'a jamais pu vraiment s'épanouir, engluée qu'elle était dans les liens du « Nom-du-Père »! J’ai le sentiment d’avoir vécu comme « par procuration », entendant par là que je n’étais pas , je n’existais pas moi-même ni par moi-même mais selon le modèle, le moule constitué par mes parents, mes grands-parents et ainsi de suite. (à condition de considérer, bien sûr, que le concept du NDP ne soit pas exclusivement référent au père biologique mais puisse s’appliquer à l’influence de tout « ascendant ».)

D'aucuns sans doute, lisant ces lignes, s'exclameront : « folie » et n'auront aucune peine à trouver, au sein des pages du DSM maintes preuves de leur constat! Pourtant, à en envisager les résultats, j'aurais plutôt tendance à dire « sagesse » ! Jugez plutôt :

Pétri, malaxé dans l'argile d'un christianisme pratiquant et triomphant j'ai été habité, depuis ma plus prime jeunesse, par un sentiment de culpabilité, transmis et lié à l'idée obscure du péché, jointe à une angoisse ressentie souvent comme épaisse et pesante face à mon inéluctable finitude et surtout aux punitions aussi hypothétiques que redoutées, que je croyais, par une sorte d’atavisme, promises à tout pécheur dans un non moins hypothétique au-delà, voire déjà dans l’immédiateté du temps qui lui est imparti, par le truchement d’événements difficiles et pénibles qui inévitablement émailleront –ou plus sûrement pourriront- sa vie.

Mais plus tard ou maintenant, en vertu de quoi justifier cette potentielle rétribution de nos actes ? Quel système, quelle croyance peut faire la démonstration de cette dernière comme étant à la fois logique et inéluctable ?

A démonter et retourner dans tous les sens les genèses fondatrices de mes « croyances[5] », à en démêler les nœuds à la force de l’esprit[6] , force m'est aujourd'hui de constater, avec sérénité, qu'elles n'ont aucun sens autre que celui ou ceux qu'ont voulu parfois y apporter des humains en quête dejustification . L’homme est ainsi fait : il a besoin de croire, besoin aussi de nier cette finitude qui lui fait si peur, quitte à s’inventer une obligatoire continuité sans la foi en laquelle il lui est bien difficile d’assumer son existence.
Pourtant rien, absolument rien ne peut me porter à croire qu’il y ait un avant et un après notre existence qui se fonde sur autre chose que purement logique ou contingent. En dépit de sa complexité, en dépit du fait qu’il soit une merveille dont nous ignorons encore bien des secrets, rien ne permet de démontrer ni même d’affirmer que l’être humain soit autre chose que le fruit d’un assemblage et d’une évolution logiques, sans la moindre intentionnalité créatrice ou autre qui justifierait sa présence dans notre monde. C’est ici et maintenant que je pense et que je suis, pas hier ni demain ! Dès lors pourquoi focaliser mon attention sur autre chose que l’instant présent, qui du reste n’est déjà plus à l’instant même où je l’envisage ? S’il est vrai que je sois la résultante d’un désir, en tant qu’individu, cela n’annule pas la possibilité que l’Homme, dans son acception générique ne soit autre chose que le fruit d’un hasard, plus ou moins heureux selon le point de vue dont on dispose !

Donc, et par conséquent, pourquoi lier notre vie et orienter celle-ci en fonction d’idéaux qui ne sont que des façons de concevoir l’existence, héritées pour la plupart d’une transmission plus ou moins traditionnelle ? Pourquoi me soucierai-je de mon « au-delà » quand la logique veut que ma vie, mon existence cesse de manière aussi sûre et définitive qu’elle a commencé ? Pourquoi surtout, optant pour ces « idéaux », irais-je infléchir le cours de cette existence si courte qui m’est donnée en m’imposant de suivre des choix et des règles conformes aux idées et croyances, aux traditions de ceux qui m’ont précédé et m’ont marqué de leur empreinte ?

Notre vie commence et finit. Point.

Entre ces deux étapes, un seul véritable choix s’offre à l’homme : celui d’être vraiment, ou de n’exister que par procuration.

La plupart d’entre nous optent, de manière plus ou moins marquée, pour la seconde solution. J’ai le sentiment très net d’avoir moi-même, et pendant très longtemps, suivi cette voie-là, qui selon ce que j’en perçois inscrit son parcours dans la foulée du « Nom-du-Père » et des options et choix de vie orientés par ce concept. Oui, durant des décennies, j’ai vécu comme par procuration, tentant vainement d’exister là même où je n’arrivais pas à être ! Et, partant, j’ai « oublié de vivre », avec toutes les conséquences corollaires à cet oubli !

Or, si l’homme veut être lui-même, il se doit d’être unique et non à l’image ou à la ressemblance de qui que ce soit, le concept de D.ieu n’étant, en cette matière qu’un pis aller, prenant fort à propos la place d’un Père devenu parfois pesant.

Etre soi implique la rupture avec les liens paternels dans toute l’acception du terme, et la prise de conscience d’une existence qui n’a pas à se mouler mais à se sculpter, prenant totalement les rênes de sa vie et en endossant la seule et unique responsabilité. L’homme ne peut vraiment se réaliser qu’en se détachant des liens qui l’entravent au « Nom-du-Père ».
N’être redevable de rien d’autre que du don de la vie, ce qui, en soi, est déjà suffisamment énorme pour qu’on puisse se passer d’avoir à porter autre chose ! Et si ce don s’est réalisé dans l’amour, tant mieux car ce sera un « plus » structurant pour la personne. Le reste n’est pas absolument nécessaire et peut s’avérer plus que réducteur !
 Si je suis un homme, je me dois de vivre ma vie exactement comme je l’entends, et non comme « on » m’a dit ou appris à la vivre. Et je n’ai surtout pas à la bâtir en fonction d’une soi-disant rétribution post-mortem.
 « La mort est un état de non-existence. 
Ce qui n'est pas n'existe pas. 
Donc la mort n'existe pas. »
C’est Woody Allen qui parle et l’on ne peut, je crois, mieux dire ! Dans un même ordre d’idée, il nous faut donc bien reconnaître que lorsque la vie n’est plus, elle n’existe pas non plus, et qu’il ne saurait donc exister « d’après » autre que celui d’un retour ou d’une fusion au néant dont nous sommes issus, à ce « vide » qui ne l’est pas vraiment. A l’Ein Sof cher aux Kabbalistes!
Il y a donc seulement un « pendant ». Pas d’avant ni d’après. Sachons donc vivre pleinement et sans entrave le « pendant », tant qu’il nous est donné. Nous rejoignons ainsi le « carpe diem » cher aux disciples d’Epicure. Cher aussi à d’autres sages, comme au Bouddha qui a cette phrase : « Le secret d’une bonne santé du corps et de l’esprit, c’est de ne pas ruminer le passé, de ne pas s’effrayer de l’avenir ni d’anticiper les difficultés à venir, mais de vivre l’instant présent avec sagesse et sérénité ».

Jean-Marie DEMARQUE
Théologien
Psychanalyste

Notes :
[1]    PLON M. & ROUDINESCO E., Dictionnaire de la Psychanalyse, Arthème Fayard, Paris, 1997.
[2]    BREL, Jacques, in « Les Bourgeois ».
[3]  « Moi est Autre » ? N’est-ce pas là quelque chose qui nous ramène au stade du miroir, au moment où l’enfant fait la dissociation entre l’image perçue initialement comme celle d’un « autre » et le reflet de sa propre corporalité ?
[4]  Manière de dire qui renvoie au Livre de la Genèse et à la conception judeo-chrétienne de l’homme, créé « à l’image et à la ressemblance de son Créateur », mais qui beaucoup plus prosaïquement renvoie au traditionnel compliment à l’égard du nouveau-né : « comme il ressemble à son papa ! » (ou « à sa maman » selon le cas !)
[5] J’appellerais « croyance » tout ce qui découle d’une foi transmise et non objectivée, non assimilée par réelle conviction personnelle. J’ai été chrétien par « foi transmise » et non par choix propre, même aux instants où je me suis cru être devenu l’auteur de ces choix.
[6] Esprit à entendre ici au sens de ce qui est psychique et non de ce qui est spirituel. L’hébreu, comme le grec sont plus explicites à ce sujet que le français !